Madame Pelchat étant à l’étranger, c’est madame Diane Guilbault qui reçoit le prix en son nom. Allocution de monsieur Daniel Drouin, vice-président du MLQ
Madame Guilbault , (madame Pelchat) et madame Beauchamp, chers invités
Je tiens à souligner la présence de M. Daniel Baril et M. Pierre de Bellefeuille du SFPQ anciens lauréats du prix Condorcet-Dessaulles
M. Guy Rocher,M. Rodrigue Tremblay, Mme Danielle Payette, Mme Yolande Geadah et Mme Louise Chabot de la CSQ se sont excusés et tiennent à féliciter les lauréates du prix 2012.
Le Mouvement laïque québécois souhaite honorer cette année deux personnes qui ont mis de l’avant le rôle clé de la laïcité, comme principe essentiel à l’atteinte de l’égalité réelle entre les hommes et les femmes dans la société civile dans la rédaction de l’Avis du CSF :Affirmer la laïcité : Un pas de plus vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Cet avis a d’ailleurs été rendu public, le jour même où nous remettions le prix Condorcet-Dessaulles au Syndicat de la fonction publique du Québec en mars 2011.
Ces deux juristes qui ont déjà été honorées à plusieurs reprises, méritent aujourd’hui de recevoir le prix Condorcet-Dessaulles 2012.
Madame Christiane Pelchat s’est toujours employée à défendre une société plus juste, députée à l’Assemblée nationale de 1985 jusqu’en 1994, par la suite, elle œuvre dans des organismes internationaux en Afrique et à Haïti à titre de chargée de mission axée sur la formation des femmes et leur accès aux lieux de pouvoir.
Présidente du Conseil du statut de la femme de 2000 à 2011, période durant laquelle, deux avis importants furent présentés sur l’égalité entre les femmes et les hommes en lien avec la liberté religieuse et la laïcité, actuellement Déléguée générale du Québec au Mexique, est représentée aujourd’hui par madame Diane Guilbault, militante laïque et féministe, qui a œuvré, elle aussi au Conseil du statut de la femme.
Madame Caroline Beauchamp, juriste mais aussi auteur de Pour un Québec laïque, édité aux Presses de l’université Laval à l’hiver 2011, nous présente une version remaniée de l’Avis du conseil du statut de la femme publié en mars 2011.
Par sa formation de juriste en droit constitutionnel, les chartes n’ont plus de secrets pour elle mais aussi par sa volonté et son désir de rendre plus accessible ce qui semble complexe, elle utilise sa créativité, ses connaissances et ses compétences afin de réaliser des projets remplis de passion pour faire avancer la société québécoise telle la laïcité!
Maintenant, Daniel Drouin, vice-président du MLQ, tient à souligner et commenter certains ponts de l’Avis :
Le débat sur laïcisation de l’État est toujours en cours au Québec et l’avènement du gouvernement Marois suppose que nous aurons à intervenir encore et encore pour toujours mieux promouvoir cette démarche collective.
Ainsi que le soulignent judicieusement les procureurs de Ville Saguenay et de son maire, il n’y pas de déclaration de laïcité au Canada, et par voie de conséquence, au Québec. Par contre le préambule dela Chartecanadienne énonce que « le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit. » N’ayant pas adhéré àla Loide 1982 sur le Canada en raison de motifs qui sont toujours pertinents et actuels, le Québec se retrouve depuis sans constitution. C’est un fait rare dans l’actuelle communauté des nations. Dans ce contexte, comment ne pas chercher à se définir, à s’orienter selon les valeurs démocratiques qui font consensus dans la population? Pourquoi demeurer dans l’attente ou l’inaction si nous voulons évoluer vers une définition d’un État véritablement représentatif de sa population.
Le gouvernement Charest n’a eu cesse de freiner les ambitions des Québécois. Il n’a eu cesse de tourner le dos à ses citoyens qui réclamaient meilleure justice sociale ainsi que le respect de leurs valeurs démocratiques. Cette population est viscéralement irritée lorsque, pour des motifs religieux, l’État fait fi de ces valeurs, dont notamment le principe d’égalité des sexes, entre les femmes et les hommes.
Heureusement, il y a de ces organismes et personnes qui veillent au grain et qui réagissent en offrant des perspectives progressistes et en sachant attaquer les valeurs sociales rétrogrades. C’est ainsi qu’en septembre 2007 le C.S.F. a publié l’avis intitulé « Droit à l’égalité entre les hommes et les femmes et libertés religieuses. » Le législateur Québécois a amendé ensuite, au cours de l’année 2008,la Charte Québécoiseafin d’y inclure ce principe. Il n’y a donc pas des lustres que ce principe fait partie intégrante de notre législation quasi constitutionnelle. Ce nouvel élément dans notre droit devrait servir à édifier une société plus égalitaire.
Dans la même veine, le CSF rendait public, en mars 2011, un Avis portant sur la laïcité de l’État. Nous y avons remarqué une position ferme et solide en faveur d’une laïcité sans qualificatifs. À sa lecture, on comprend aisément pourquoi la laïcité ouverte est, de fait, la négation même du principe de la séparation de l’État et des Religions et\ou des diverses confessions religieuses. La laïcité ouverte échouerait lamentablement à assurer la protection des droits des femmes. Et justement, les croyances ou dogmes ne doivent en aucun cas mettre en péril ce principe toujours à concrétiser.
La série noire de revendications d’accommodements religieux est toujours présente et le deviendra encore plus si l’État abdique devant ses responsabilités, ainsi que ce fut la cas sous le précédent gouvernement. La culture des accommodements à tout prix parvient malheureusement à justifier qu’un établissement d’enseignement accepte de participer à l’ostracisme d’une enfant qui ne pourra, pour des motifs religieux, participer aux activités musicales organisées pour les élèves de sa classe! Pourtant, la socialisation des enfants passe par des activités communes et il doit y avoir un tronc commun à respecter, sauf pour des raisons purement objectives.
Ainsi que le souligne l’Avis du CSF, il doit y avoir une délimitation entre la vie privée et la vie en société. Les droits des uns ne doivent pas empiéter sur ceux des autres, il faut plutôt créer un équilibre entre ceux-ci, c’est élémentaire. Afin d’y parvenir, l’État doit montrer la voie et s’affirmer indépendant à l’égard des pressions toujours plus insistantes des lobby religieux. La liberté religieuse est sujette à des limites, ainsi que toutes les autres libertés d’ailleurs. Affirmer le contraire, c’est promouvoir la hiérarchisation des libertés et droits avec tous les risques que cela comprend, dont l’arbitraire et l’absolutisme.
La population du Québec se montre fière des progrès réalisés depuis des décennies et elle cherchera sans cesse à les protéger. Dans la poursuite de cette voie, il faut que la collectivité ait droit au chapitre et que les lois ne soient pas uniquement interprétées en faveur des libertés individuelles, puisqu’il faut tenir compte de l’intérêt commun aussi, de l’ordre public en somme.
L’Avis du C.S.F. fait le constat que la laïcité ouverte est un véritable piège pouvant nous entraîner dans un bourbier monumental en minant nos valeurs démocratiques. Pour contrer cela, il y est proposé de procéder à des amendements àla Charte Québécoisedes droits et libertés de la personne en y insérant l’énoncé suivant dans son préambule :
Considérant que l’État est laïque.
Puis, l’ajout d’un élément à l’article 9 de cette même Charte qui se lirait comme suit :
Les libertés et droits fondamentaux s’exercent dans le respect de la laïcité de l’État, des valeurs démocratiques et du bien général des citoyens du Québec.
Le Mouvement laïque québécois se réjouit de cette proposition. En mai 2010, nous avions intégré à notre Mémoire portant sur le Projet de loi 94 – projet qui consacrait la laïcité ouverte – un projet de loi allant dans le même sens. Les formulations sont différentes, soit. Toutefois, comme il y a convergence quant au principe essentiel, notre tâche consiste à poursuivre nos efforts pour atteindre cet objectif commun.
Il faut cesser de nourrir l’influence du religieux sur le politique entre le politique, car la laïcité ouverte porte bien souvent atteinte aux avancées de nombreux droits démocratiques.
Nos adversaires prétendent que les accommodements religieux sont exceptionnels et qu’il n’y a aucun risque à les accorder. De notre point de vue, c’est de la foutaise. Nous constatons qu’ils veulent justifier l’injustifiable, à savoir tolérer la discrimination. Mais justement, même exceptionnelle, la discrimination n’a jamais sa place.
Par ailleurs nous sommes tous préoccupés par le programme ÉCR. Si le législateur adoptait les amendements àla Charteque nous envisageons, ce projet d’endoctrinement religieux de toute une jeunesse n’aurait pu exister.
Les Québécois exigent le respect de leurs grandes valeurs démocratiques et seul un État laïque pourra l’assurer.
La contribution de Mesdames Pelchat et Beauchamp est de grande importance, voire capitale pour l’atteinte de nos objectifs. Voilà donc pourquoi nous sommes heureux et fiers de leur attribuer le Prix Condorcet-Dessaules 2012.
Lucie Jobin, présidente du Mouvement laïque québécois
Daniel Drouin, vice-président du Mouvement laïque québécois
Monsieur Michel Lincourt, membre du Conseil national du MLQ lit une lettre de félicitations de madame Carole Poirier, députée d’Hochelaga-Maisonneuve et Vice-présidente de l’Assemblée Nationale du Québec.